"C'est déjà une puissance diminuée"
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n mobilisant 40 pays et en prévoyant un budget de 33 milliards pour l'Ukraine, Washington choisit d'ignorer les menaces de Vladimir Poutine d'utiliser l'arme nucléaire et affronte Moscou de façon de moins en moins voilée, ne craignant apparemment pas de pousser le président russe dans ses retranchements.
Au lendemain d'une réunion organisée par
Washington à Ramstein, en Allemagne, pour organiser le soutien d'une
quarantaine de pays à l'Ukraine, M. Poutine a promis mercredi une réponse
"rapide et foudroyante" en
cas d'intervention extérieure dans le conflit.
Le président russe a mentionné "ces outils dont personne d'autre ne peut se
vanter actuellement", une allusion à peine voilée à l'arme nucléaire
tactique, dont la doctrine militaire russe prévoit l'utilisation pour forcer un
adversaire à reculer.
Loin de reculer, Joe Biden a répliqué le
lendemain en demandant au Congrès une colossale rallonge budgétaire de 33
milliards de dollars, dont 20 milliards doivent aller à la fourniture
d'armements, soit près de sept fois plus que les quantités pourtant
impressionnantes d'armes et munitions déjà fournies à l'Ukraine depuis
l'invasion russe, déclenchée le 24 février.
L'administration américaine livre
désormais de l'armement lourd à Kiev, comme de l'artillerie, des hélicoptères
et des drones, après avoir longuement hésité à le faire de peur d'étendre le conflit
à d'autres pays de l'OTAN.
Cette inquiétude paraît avoir disparu à
Washington, où le ministre de la Défense Lloyd Austin s'est donné lundi pour
objectif de "voir la Russie
affaiblie à un degré tel qu'elle ne puisse pas faire le même genre de choses
que l'invasion de l'Ukraine", au retour d'une visite à Kiev.
Au sein du gouvernement américain, la
menace nucléaire de la Russie est désormais balayée d'un revers de la main.
Joe Biden a ainsi fustigé jeudi les
menaces "irresponsables" de Vladimir Poutine et jugé qu'elles
montraient "le sentiment de
désespoir ressenti par la Russie, confrontée à son misérable échec au regard de
ses objectifs initiaux".
Et vendredi, un haut responsable du
Pentagone a affirmé que Washington "ne
pense pas qu'il y ait un risque d'usage d'armes nucléaires ou que le territoire
de l'Otan soit menacé".
- Menaces russes prises "moins au sérieux" Pour Lawrence Freedman, professeur émérite au King's College de Londres,
les diverses menaces de la Russie "sont prises moins au sérieux
qu'avant". "C'est déjà une
puissance diminuée", ajoute-t-il sur son blog.
Des conclusions partagées par Gideon
Rose, du Council on Foreign Relations à New York. "Moscou n'utilisera pas d'armes nucléaires pendant le conflit",
affirme-t-il dans la revue Foreign Affairs.
Vladimir Poutine "sait que des
représailles extraordinaires et un opprobre universel suivraient, sans qu'un
avantage stratégique puisse les justifier, sans compter que les effets
radioactifs que cela provoquerait pourraient facilement retomber sur la
Russie", ajoute-t-il.
Même si M. Biden affirme que les
Etats-Unis "n'attaquent pas la Russie", Washington vient de donner un
coup d'accélérateur aux livraisons d'équipements militaires à l'Ukraine, et
forme désormais ouvertement des militaires ukrainiens aux armements lourds
américains, après l'avoir fait discrètement.
Le conflit prend donc toutes les
apparences d'une "guerre par procuration" contre Moscou, par l'intermédiaire
des Ukrainiens, note Sam Winter-Levy, de l'université de Princeton, sur le blog
spécialisé War on the Rocks.
Ce genre de guerre par pays interposés,
comme celle qui oppose l'Arabie saoudite à l'Iran par l'intermédiaire des
rebelles houthis au Yémen, "est la pire issue possible" car elle
présente un risque d'escalade et que ce genre de guerre dure généralement
longtemps, estime cet expert qui collabore également avec l'académie militaire
américaine de West Point.
Mais "c'est peut-être la meilleure
option possible", car les Occidentaux "n'ont pas le choix",
ajoute-t-il. "En fin de compte, les seules options pires que la guerre par
procuration sont une victoire à bon compte de la Russie en Ukraine, ou une
confrontation directe entre les Etats-Unis et la Russie".
AFP
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