03 octobre 2021

Les plus grands événements de lutte de ces 15 dernières années

Balla Gaye 2 bat Yékini

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n termes de combats événementiels, il faudra retenir certaines dates, le nom de certains lutteurs et bien entendu, de certains promoteurs faiseurs de ces événements. Nous ne voulons pas dissocier. Nous avons également choisi de ne pas trop reculer, de partir de la saison 2006-2007 à nos jours. Quinze (15) ans pour passer au peigne fin les combats de lutte qui ont vraiment marqué les esprits et donné un coup de fouet à la pratique de ce sport et également aux montages des chocs les plus inédits.

Il est important avant tout propos, de souligner qu’on note des chocs historiques avant ceux dont nous parlons. Des confrontations d’une autre époque plus ou moins reculée, restées également dans les anales. Mais notre canevas de travail se situe entre 2006 et 2021.

22 juillet 2007, Gris Bordeaux bat Bombardier : Un Tigre était né

Ce jeune lutteur de l’écurie Fass avait vraiment commencé à taper dans l’œil des amateurs et des promoteurs que lorsqu’il a battu Bombardier de Mbour le 22 juillet 2007 au stade Demba Diop. Un combat monté par le promoteur Petit Mbaye de Action 2000, un nom à retenir. Mais 7 mois plus tôt, il avait plié Lac de Guiers 1 (Walo), un coriace de la même génération que Tapha Guèye (Fass), chef de file de Gris Bordeaux. Mais c’est vraisemblablement après le sacre devant le B52 qu’il a vraiment pris son réel envol et hérité de l’appellation de 3ème Tigre de Fass avant son intronisation. Pour revenir au choc, on notera que Demba Diop avait revêtu sa tenue des grands jours. Stade plein à craquer. Mais il a fallu un simple geste de tirage de Nguimb pour voir Bombardier glisse sur le gazon et s’écrouler devant Gris Bordeaux agenouillé pour enclencher une autre action.

Événement grandiose piloté par le groupe Action 2000 du promoteur Petit Mbaye, grand faiseur de champions, Roi de l’événementiel, véritable Don King de l’arène à l’époque. C’est Action 2000 sous l’impulsion de Petit Mbaye qui montait les combats les plus significatifs de l’époque même si les Gaston Mbengue, Luc Nicolaï, Khadim Fall Productions, Alpha Samb, Serigne Modou Niang, Palla Mbengue, Ndèye Ndiaye Tyson et bien d’autres apportaient également leurs pierres à l’édification de la lutte.

Petit Mbaye était incontestablement le Maître du jeu.

27 juillet 2008 : Modou Lô remporte le CLAF

L’histoire retiendra que c’est le promoteur Gaston Mbengue qui a initié pour la première fois, un championnat de lutte avec frappe (CLAF) au Sénégal. Par ailleurs, il avait fait un petit essai en 2006 sous l’appellation de mini-championnat qui avait enregistré l’éclosion des champions comme Balla Gaye 2 (école de lutte Balla Gaye), Lac 2 (Walo), Tapha Tine (Baol Mbollo), Issa Pouye (Thiaroye-sur-Mer), Zoss (Door Dooraat), Bathie (Guinaw Rails), Balla Diouf (Fass), Boy Sèye (Pikine Mbollo).Mais c’est en passant de mini-championnat à championnat en 2007-2008, que Gaston Mbengue a commencé à ratisser large et à véritablement remplacer Petit Mbaye (Action 2000) qui avait eu des problèmes et s’était exilé en Europe. Ce tout premier championnat dénommé CLAF par la presse, regroupait 44 lutteurs repartis en 11 poules. Jamais, de mémoire d’homme, un promoteur n’avait eu telle idée. Les compétions éclatées animaient les régions du Sénégal. De Dakar à Tambacounda, c’était l’effervescence. Le nom de Gaston Mbengue était scandé partout. Il était devenu le nouveau Don King de l’arène. Il avait enrichi de nombreux lutteurs qui, même dans leurs rêves les plus fous, ne pensaient pas empocher de tels cachets. «Mon championnat a fait des heureux, non pas chez les lutteurs seulement, mais aussi chez les journalistes, puisque Balla Diouf de Fass filait le bel amour avec Ndèye Coumba» aimait-il à dire, histoire de taquiner un peu notre consœur.

Ces compétitions du CLAF avaient abouti aux finales entre Modou Lô et Boy Kaïré (Soumbédioune) d’une part, Soulèye Dop (Sine Saloum) et Moussa Dioum (Sakku Xam Xam) d’autre part. Modou Lô et Soulèye Dop avaient pris le meilleur sur leur vis-à-vis respectivement par des KO.

Cette idée de Gaston Mbengue à créer un championnat à cette période, était très novatrice et cadrait avec la politique du pays quant à l’absorption du chômage et constituait aussi un frein contre la migration clandestine vers l’hypothétique Eldorado qu’est l’Europe (Barça ou Barsakh).

4 avril 2010 : Retour de Tyson face à Yékini, Les cachets passent le cap des 100 millions de FCFA

Tyson de Boul Faalé, l’ancien chouchou de l’arène avait été sanctionné par le CNG de lutte pour avoir contesté et quitté l’aire du duel contre Bombardier de Mbour le 7 janvier 2007. Une longue sanction assortie de 7 millions de francs CFA retenus sur son cachet. Très amer, il avait préféré quitter l’arène pour faire autre chose. Mais avec l’avènement de Gaston Mbengue qui a fait de la lutte un vrai business, les tractations ont fini par aboutir au retour du chef de file de la génération Boul Faalé. En cette même période, la bataille des promoteurs entre Gaston Mbengue et Luc Nicolaï faisait rage. Chacun était prêt à tout pour être le plus vu, le plus grand. Si bien que Gaston Mbengue qui s’était associé à d’autres promoteurs pour décrier et combattre la flambée des cachets dans l’’arène, a fini par se dédire. Alors qu’eux tous s’accordaient à plafonner les prix (30 ou 40 millions au plus), Gaston Mbengue contre toute attente, décaisse plus de 100 millions pour le retour de Tyson contre Yékini le Roi des arènes. Yakhya Diop aurait reçu 100 et Tyson 120 millions.

Mais il faudra aussi retenir que la barre des 100 millions pour un seul combat a été pour la première fois franchie à cette époque par Gaston Mbengue. Un duel où avait encore terrassé Tyson pour la Nième fois au stade Léoplod Sédar Senghor. C’était un événement inoubliable.

Balla Gaye bat Modou Lô : Et la ferveur retomba

Ces deux jeunes lutteurs avaient atteint un niveau de compétition et de notoriété qui les forçait à se croiser. Trop de provocations, trop d’agressions, trop d’invectives, la banlieue bouillonnait à tout moment. Même pour des combats qui ne les engageaient pas, les supporters de Balla Gaye 2 et Modou Lô occasionnaient les violences dans les stades. Le promoteur Luc Nicolaï a fini par décrocher ce derby de la banlieue. Lutteurs les plus populaires du pays, ce n’était pas une mince affaire. Là également, le promoteur avait cassé sa tirelire pour satisfaire les exigences des combattants. Le choc a eu lieu le 21 mars 2010 à Demba Diop. Il a vu la belle victoire du Lion de Guédiawaye sur le Roc qui encaissait ainsi sa toute première défaite après avoir remporté le Championnat de lutte avec frappe. Balla Gaye 2 était le roi de la banlieue. Il avait été éminemment supérieur à son adversaire sur tous les plans. Il l’avait battu dans tous les compartiments du combat. Cette ferveur qui alimentait les débats, qui occasionnait des batailles de tranchées entre supporters, s’est estompée avec cette victoire du Lion.

Cette date avait également marqué les esprits car le coté organisationnel avait été à la hauteur de l’événement avec ces feux d’artifices qui ont encerclé les combattants pendant quelques minutes avant le coup d’envoi.

22 avril 2012 : Yékini est détrôné : Balla Gaye 2 le plus jeune Roi des arènes à 26 ans

Cest encore Luc Nicolaï & Co qui avait décroché ce combat prestigieux. Il mettait aux prises 2 lutteurs de générations différentes et de styles différents également. Yékini qui avait régné 8 ans comme Roi et qui était resté 15 ans invaincu, avait fait le vide autour de lui. Bombardier, Tyson, Baboye, Tapha Guèye etc, il les avait tous balayés. Certains avaient même été terrassés 3 fois de suite. Il avait par la suite fait une promenade de santé face à Gris Bordeaux de Fass qu’il a laminé facilement. Le fassois était réellement le premier jeune lutteur d’une génération différente. Balla Gaye 2 était le 2ème.

Ce rendez-vous de l’arène était l’un des plus mémorables de ces 15 dernières années de par son enjeu et sa haute sportivité. Car si Yékini avait régné sans partage parmi ceux de sa génération, Balla Gaye 2 avait fait autant et ne voulait que titiller la haute sphère. Tout avait été dit sur ce combat. Les signatures de contrats et autres face-à-face émaillés parfois par des violences inouïes. Yékini sous haute pression, puisqu’ à chacune de ses sorties, certains voulaient le voir perdre. S’il était battu, il y aurait une autre recomposition dans l’arène, une autre nomenclature.

Et le jour fatidique arriva.

Balla Gaye 2 était le premier à mettre les pieds à Demba Diop vers 14 heures. Une heure inhabituelle. Yékini arriva à son heure habituelle, vers 15, 16 heures. Et dès que le coup d’envoi fut donné par l’arbitre central, tout le stade était glacé. Tout le public avait retenu son souffle. On pouvait même entendre la voix de la vendeuse de Thiakry ak nekh sow depuis le petit marché de Grand Dakar. Et après quelques minutes, suite à la chute historique de Yékini sur le côté droit comme l’avait prédit une célèbre diseuse de bonne aventure, c’était le déchaînement, le déferlement de toutes sortes de lamentations. Qui pour pleurer, qui pour se réjouir.

Le Baobab de Bassoul avait été déraciné. Yékini n’était donc pas un dieu !

Mamadou Koné, New-York (USA)


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