11 octobre 2013

Liens familiaux dans l'arène

Double Less, Balla Gaye 2, Sa Thiès et bien d’autres 
Double Less (gche), Sa Thiès (centre) et Balla Gaye 
D
is moi qui est ton frère, je te dirai quel lutteur tu es… C’est devenu monnaie courante dans l’arène. Les histoires de fratrie font florès dans le milieu de la lutte avec frappe...
Plus qu’un effet de mode, le fait mérite d’être inspecté sous l’angle des avantages et inconvénients que procurent de voir son sang partager sa passion.
LA SOUFFRANCE D’EUMEU SÈNE
Eumeu Sène a certainement vécu toutes sortes d’émotions le lundi 1er avril dernier, quand il a dû observer de chez lui la troisième sortie de son jeune frère, Khadim, à cause d’une suspension. Le supplice a dû être d’autant plus douloureux pour lui qui se déplace toujours pour assister tous ses jeunes partenaires d’écurie, quelle que soit l’envergure du combat. Son frère faisait face à Baye Mandiaye, poulain de son meilleur ennemi Balla Gaye 2. Du coup, quand il s’en est tiré avec une magistrale victoire, Eumeu Sène a profité aux délices de la délivrance. Voir son jeune frère embrasser la même carrière que soi procure du plaisir. Une certaine fierté de servir de modèle. Khadim Ngom reconnaît volontiers que c’est son champion de frère qui lui a filé le virus. «C’est lui (Eumeu Sène) qui m’a fait aimer la lutte. Je le suivais depuis les séances de «mbappat» jusqu’à ce qu’il devienne un champion incontournable en lutte avec frappe. Par la suite, j’ai fini par céder à la passion.»
BALLA GAYE 2, SA THIÈS, LOURD HÉRITAGE DU PATER
Comme Eumeu Sène et bien avant lui d’ailleurs, Balla Gaye 2 a lui aussi vécu les sensations de voir son frangin, Sa Thiès, descendre dans l’arène. Aussi imposant physiquement que le roi des arènes, l’autre fils de Double Less se voit prédire un avenir au moins aussi radieux que son grand frère. Qui ne se gêne pas d’afficher sa complicité et son admiration pour Sa Thiès. «Je trouve qu’il est meilleur lutteur que moi», enjolive Oumar Sakho alias Balla Gaye 2, quand le nom de son frère est évoqué. Sans doute un peu flatteur, certainement admiratif, le tombeur de Yékini vit intensément les combats de son frère. «Au-delà du fait qu’il soit mon frère, Sa Thiès est surtout un ami. Il se fatigue plus que moi pour mes combats.» Le jeune frère lui rend bien cette sympathie. «Mon ambition, c’est de marcher sur les pas de mon frère et de perpétuer l’héritage de mon père (Double Less). Je l’écoute beaucoup pour en arriver au même niveau car Balla est un champion qui me conseille tout le temps.»
GARGA, BOUCLIER DE ZOSS
Entre Eumeu Sène/Khadim Ngom et Balla Gaye 2/Sa Thiès, le point en commun c’est que les trajectoires respectives des frères ne sont pas proches. Eumeu Sène a commencé la lutte près d’une décennie avant son jeune frère, tandis que Sa Thiès en est encore aux balbutiements là où son frère truste les étoiles. La règle n’est pas valable pour Zoss et Garga Mbossé. Zoss est certes mieux coté, mais pas grand chose. Le physique plus imposant de Garga, plus jeune de la fratrie, y est certainement pour beaucoup. Du coup, il sert désormais de bouclier à son grand frère (voir par ailleurs).
FASS, LA FRATRIE DES TIGRES
Fass aussi a ses frères de sang. Si les célèbres Tigres de Fass Mbaye Guèye et Tapha Guèye ne sont pas descendus dans l’arène au même moment, tel n’est pas le cas pour le troisième Tigre, Gris Bordeaux, qui voit son jeune frère suivre ses pas. «Le fait de voir son frère lutter l’a incité davantage à venir dans l’arène», affirme Gris Bordeaux, à propos de Mansour Dione, le jeune frère dont il retrace les premiers pas dans l’arène, en témoin privilégié : «Au début, il n’ambitionnait pas de devenir un lutteur, mais trouvait du plaisir à s’entraîner avec moi, à lutter, à faire la boxe. Souvent, il s’amusait à lutter contre certains de sa génération dans le quartier et leur infligeait des défaites. C’est ainsi qu’il a chopé le virus.» Quand on lui demande les conséquences de grandir à l’ombre d’un grand frère qui sévit dans l’arène, Gris Bordeaux n’y voit que du rose. «J’ai foncé tout seul, mais lui a la chance d’avoir un frère lutteur qui l’encadre, ce sont des atouts pour aller loin. Plus loin que son frère… Ton frère peut ne pas être ton ami. Un ami, c’est celui avec qui l’on a les mêmes principes. Lui, c’est mon ami.»
JAMAIS DEUX SANS TROIS
Toujours à Fass, il y a encore mieux avec la famille Sow. Il y a Ouza, le pionnier, qui, avant de sombrer à cause de sa frêle morphologie, a tracé le sillon à plusieurs lutteurs des Parcelles Assainies. Parmi eux, son jeune frère, Papa Sow, moins fantasque, mais plus réaliste et sérieux prétendant à la cour des grands. Dans une famille de grande tradition sportive (leur père, Assane Sow, est un ancien lutteur tandis qu’un de leurs frères, récemment décédé, était footballeur), la règle du jamais deux sans trois est respectée jusqu’au bout. Ainsi, Ouza et Papa Sow ont un autre frère qui noue le «ngimb» comme eux, Tapha Junior.
Dans la même lignée des triplés dans l’arène, il y a aussi les fils de l’ancien champion sérère Robert Ndiaye avec Mamady, Mbagnick et Ablaye Ndiaye. Le premier, plus âgé, coaché par Manga 2, le second sous les ordres de l’écurie Ndakaru de Yékini, et le dernier qui vient de disputer son premier combat en lutte avec frappe, il y a moins de deux semaines, encore sous les ordres de son père dont il entend suivre les traces.
Enfin, il y a aussi les cas des Modou Lô dont le jeune frère, Ablaye Lô, serait en train d’affûter ses armes pour faire ses premiers pas et du petit frère du jeune Fassois, Lac Rose, Pape Ndoye, a déjà disputé deux combats de moindre envergure.
Avec L’Observateur


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